Après la porcelaine de Limoges ou encore la tapisserie d’Aubusson, c’est au tour des pierres marbrières de Rhône-Alpes d’obtenir le fameux label de l’Indication géographique. Obtenue en novembre 2019, l’IG devrait permettre à toute une filière de se redynamiser et de faire valoir la qualité exceptionnelle du matériau et l’exigence d’un véritable savoir-faire. La Vie en Pierre vous en dit plus sur le label, les caractéristiques des pierres marbrières de Rhône-Alpes et les professionnels qui les travaillent au quotidien.
L’IG ou indication géographique, c’est la reconnaissance de l’origine locale d’un produit manufacturé ou d’une ressource naturelle comme une AOC pour un produit agricole. Avant les pierres marbrières de Rhône-Alpes, seulement deux autres pierres naturelles avaient obtenu le label : le granit de Bretagne et la pierre de Bourgogne. Pour les pierres marbrières, la démarche d’obtention de l’IG a été impulsée par l’association Rhonapi qui regroupe une soixantaine d’entreprises de la filière des métiers de la pierre. Son président, Christian Laurent, souhaitait une véritable reconnaissance de ce matériau d’exception : « Face à la concurrence et au flou entretenu par certains sur l’origine des pierres, il fallait trouver un moyen de se démarquer. L’idée est d’éviter la contrefaçon et de certifier au consommateur le lieu d’extraction et le lieu de transformation de la pierre. »
Place des Jacobins, Lyon - Pierre de Villebois
Acheter aujourd’hui une pierre marbrière de Rhône-Alpes c’est acheter une pierre dont on connaît parfaitement la provenance. Pour que le produit soit certifié « IG », il faut que la pierre ait été extraite dans un certain périmètre : Isère, Ain et Ardèche. Pour le lieu de transformation, il faut ajouter à ce périmètre la Drôme, la Loire, le Rhône, la Savoie et la Haute-Savoie pour respecter l’indication géographique. Si un professionnel venait à vendre une pierre en prétendant qu’elle appartient à l’IG alors que ce n’est pas le cas, il s’exposerait à des sanctions de l’État. Avec les pierres marbrières de Rhône-Alpes, le consommateur a l’assurance de consommer local et de choisir un produit de qualité.
Avec l’IG, Christian Laurent se réjouit de mettre tout un territoire à l’honneur : « Nous avons voulu mettre l’accent sur une pierre bien particulière qui fait l’identité de notre territoire. Sur l’ensemble de la France, il y a très peu de régions qui proposent une telle concentration de pierres marbrières comme celle-ci. » Ce sont d’abord toutes les entreprises du territoire qui seront certifiées IG qui seront tirées vers le haut : « L’entreprise certifiée va pouvoir afficher qu’elle s’engage dans une démarche qualitative et locale. C’est un enjeu important en termes d’image. » Pour Christian Laurent, le grand gagnant c’est aussi le territoire dans son ensemble : « Les entreprises, qui s’engagent dans l’IG, s’engagent à fabriquer sur place, c’est à dire à embaucher et à investir. Et ça c’est essentiel ! C’est un message qu’il faut faire passer à nos élus. Les collectivités sont d’importants consommateurs de matériaux et notamment de pierre et elles doivent savoir que lorsqu’on choisit la pierre marbrière de Rhône-Alpes, on choisit aussi une entreprise qui a investi sur le territoire. » Le président de Rhonapi est persuadé aujourd’hui que l’IG sera « un merveilleux outil de promotion pour la filière professionnelle comme pour le territoire. » Ce qui se joue, c’est l’avenir d’une multitude de petites entreprises: des carriers, des façonniers, des tailleurs de pierre, des marbriers, des poseurs…
Promenade de Fontaines-sur-Sâone - Boursier-Mougenod Paysagiste
Pour bénéficier de ces retombées, les entreprises doivent accepter de s’engager fortement dans la démarche. Celles qui souhaiteront profiter de l’IG vont devoir faire une demande de certification impliquant un certain nombre de contraintes. Rhonapi va avoir un rôle important à jouer : « L’association va devoir expliquer, convaincre les entreprises de l’intérêt de devenir opérateur IG et ensuite, les préparer et les former dans la perspective de la certification. » Aujourd’hui, il n’existe pas encore d’entreprises certifiées mais une dizaine se sont positionnées pour devenir opérateurs initiaux. À terme, cela pourrait représenter au moins une centaine d’entreprises du territoire. Les entreprises volontaires devront se conformer au cahier des charges de l’IG. C’est ensuite l’organisme certificateur qui se rendra dans ces entreprises pour vérifier la traçabilité de la pierre et accorder ou pas la certification.
Mais revenons aux caractéristiques des pierres marbrières de Rhône-Alpes. Ce sont des calcaires formés à l’ère Jurassique et à l’ère Crétacé Inférieur. Christian Laurent tient à rappeler l’importance du terme « marbrières » : « Au milieu de la grande famille des pierres calcaires, les pierres marbrières sont les plus dures. Elles ont les qualités nécessaires pour répondre à l’opération du polissage. C’est une toute petite partie des pierres calcaires. » Elles ont des caractéristiques techniques très spécifiques. Ce sont des roches particulièrement compactes avec une dureté et une densité exceptionnelles. Elles se caractérisent aussi par la finesse de leur texture et une multitude de teintes qui vont du beige rosé brun au gris jaune.
La liste non-exhaustive des différents matériaux calcaires pouvant prétendre à la protection de l’IG « Pierres marbrières de Rhône-Alpes » sont :
Aménagement paysager - Pierre de Hauteville
Les usages connus des pierres marbrières de Rhône-Alpes remontent à l’Antiquité. Le président de l’association Rhonapi, Christian Laurent, est fier de la richesse de cette histoire : « Depuis l’Antiquité, les usages de cette pierre ont été nombreux. Elle a servi dans le bâtiment, pour des aménagements publics, des ponts, des soubassements d’immeubles ou encore des escaliers. » Les pierres marbrières de Rhône-Alpes ont ainsi servi à la construction du théâtre d’Orange ou encore des arènes de Nîmes, puis plus tard à la construction de la cathédrale Saint-Jean de Lyon ou de la bibliothèque nationale de Paris. À l’étranger, on les retrouve sur l’Empire State Building de New-York, le Capitole à Washington ou l’Escurial en Espagne. Actuellement, la roche est encore très recherchée : « Elle est principalement utilisée pour de la restauration de patrimoine, de l’aménagement extérieur privé ou public, des sols intérieurs, des escaliers, des revêtements de façade ou encore de la décoration de salle de bain ou de cuisine. » Et si c’est en France qu’elles se vendent le mieux, les pierres marbrières de Rhône-Alpes savent encore s’exporter : en Suisse, aux États-Unis pour des projets de buildings ou de villas, en Angleterre mais également en Asie et au Moyen-Orient où leurs qualités sont déjà reconnues.
Pour plus d'informations sur la Pierre Naturelle d'Auvergne-Rhône-Alpes, rendez-vous sur le site de l'Association Rhônapi.