Le Château des ducs de Savoie ou la pierre à travers les époques

Le Château des ducs de Savoie ou la pierre à travers les époques

Il se dresse fièrement au cœur de la vieille ville de Chambéry. Construit au XIème siècle, le Château des ducs de Savoie attire chaque année de nombreux visiteurs désireux de découvrir les salles de la Chambre des comptes et la Sainte-Chapelle. Mais derrière cette architecture imposante, c’est tout un pan de l’histoire de France qui s’offre aux curieux. Ancien château fort devenu siège de la Préfecture et du Département de la Savoie, découvrez son histoire méconnue et ses techniques de construction.

 

L’emblème du pouvoir des Ducs de Savoie

 

Au XIème siècle, les conflits locaux sont nombreux. Escarmouches et embuscades rythment le quotidien tandis que les pillages et autres rapines sont le lot des populations les plus pauvres. Pour sécuriser leur territoire, les seigneurs de Chambéry bâtissent une place forte constituée de deux tours, d’une haute-cour, d’une basse-cour et d’une poterie. Un lieu primitif qui sert de base dès 1295 à la construction d’un véritable château fort. Sa vocation ? Protéger le comte Amédée V face aux seigneurs du Dauphiné ! Des tours défensives, une grande muraille et des corps de bâtiments sont ainsi édifiés.

Au fil des décennies, les comtes se succèdent et le château se métamorphose en véritable palais royal. C’est surtout sous le règne d’Amédée VIII – entre 1408 et 1430 – que le monument commence à avoir fière allure avec sa Sainte-Chapelle en style gothique et sa grosse tour carrée. Celle-ci appelée tour des Archives parachève l’angle sud-est.
Chambéry devient alors la capitale du duché de Savoie, fief du Saint-Empire germanique, et bénéficie d’une grande indépendance. Seulement voilà, plusieurs catastrophes vont frapper le château…

 

 

Celui qui renaît de ses cendres !
 

En 1523, un premier incendie détruit la Sainte-Chapelle, qui est reconstruite. En 1743, ce sont les appartements royaux qui partent en fumée. Et dans la nuit du 23 au 24 février 1798, les flammes font disparaître une grande partie des bâtiments. Ne reste que les éléments médiévaux, la Sainte-Chapelle, l’Aile Royale et la Tour demi-ronde ! Mais tel le phénix, le château retrouve à chaque fois de sa superbe et les bâtiments disparus ou abimés sont remplacés ou restaurés. Des exemples : la construction d’un escalier monumental par l’architecte Piacenza, les peintures en trompe-l’œil sur les voûtes de la Sainte-Chapelle réalisées par l’artiste Casimir Vicario ou encore la façade baroque dessinée par l’architecte Castellamonte. Mais c’est surtout après 1800 que d’importants travaux de restauration sont engagés par les préfets. Leur but ? Que le château devienne le siège de la préfecture et du Conseil général du département du Mont-Blanc.

 

 

Un château à plusieurs facettes

 

Si de nombreux artistes réputés se sont succédés au fil des époques, leurs créations sont à chaque fois une fenêtre ouverte sur un style architectural : la Chambre des Comptes dévoile la géométrie du style médiévale, la Cour d’honneur et la Sainte-Chapelle met à l’honneur les rosaces et les ogives du style gothique, la tour carrée des Archives illustre un baroque flamboyant, tandis que les appartements royaux remettent au goût du jour les éléments gréco-romains dans un style néoclassique élégant ! Et la cerise sur le gâteau pour les amoureux de l’architecture et de la technique : le Grand carillon réalisé par la Fonderie Paccard en 1938. A l’époque, il est composé de 37 cloches d’une justesse inégalée. Restauré en 1991, il compte désormais 70 cloches d’un poids total de 41 tonnes, devenant le plus grand carillon de France et le 8ème au monde.

 

Des fouilles archéologiques pour découvrir les techniques de construction… et l’origine des pierres employées

 

En 2008, le Conseil général de Savoie a commandité des fouilles afin de découvrir les secrets de construction du château. Ces travaux ont permis de mettre au jour la maçonnerie des murs et les matériaux utilisés. On a ainsi découvert que les éléments médiévaux sont essentiellement composés de grands modules en calcaire dur de 0,30 m de haut par 0,50 m de long et d’un mortier de chaux à base de sable noir. L’étude des murs du bâtiment appelé Appartements du Prince a également révélé la composition des parements : la partie interne est constituée de moellons de tout-venant tandis que la partie externe est exclusivement constituée de pierres de taille de la région !

Autre découverte, le fond des placards datant du XVème siècle est un mélange de calcaire, de galets et de tuf mélangés à un mortier de chaux blanc-gris. Quant à la couche picturale utilisée à cette époque, il s’agit essentiellement d’un ocre-jaune agrémenté d’un fin liseré brun-rouille. Au cours des restaurations successives, des nouveaux matériaux sont venus renforcer l’édifice, comme la brique, le ciment et des blocs de molasse. On retrouve même des parpaings en béton utilisés pour doubler les allèges des fenêtres !

 

Le mystère du Saint-Suaire

 

Grâce à ces multiples étapes de restauration, le Château des Ducs de Savoie est estampillé Monuments historique depuis 1881. Mais s’il attire autant de visiteurs, c’est en partie parce qu’une copie du Saint-Suaire de Turin est visible dans la Sainte-Chapelle. La légende raconte que le duc Louis et son épouse Anne de Lusignan acquièrent en 1453 une relique d’une grande valeur. Il s’agit d’un drap blanc avec l’ombre d’un homme couleur sépia ayant subi une crucifixion. Pour de nombreux chrétiens, ce linceul aurait enveloppé le corps du Christ. Si son arrivée en Europe reste un mystère, on sait qu’une cérémonie somptueuse a été donnée dans la Sainte-Chapelle en 1502 en son honneur. Depuis, le Saint-Suaire de Turin est reparti en Italie mais les fidèles peuvent admirer sa réplique à Chambéry ! 

 

Une nouvelle vie pour le Château des Ducs de Savoie

 

Aujourd’hui, l’édifice imposant conserve son rôle administratif et accueille les services de la Préfecture et du Conseil départemental. C’est aussi un lieu de vie culturel où sont organisés des expositions, des concerts et des visites guidées notamment dans la chambre des grands comptes. Celle-ci, avec ses pierres de taille restaurées et ses meneaux de fenêtres reconstitués, retrouve son faste d’antan ! Les anciens éléments architecturaux ont été mis à jour et valorisés pour conjuguer authenticité et confort des visiteurs. D’ailleurs, des visites guidées en petit comité sont organisées pour découvrir la richesse de ce patrimoine. C’est le moment d’en profiter…

 

 

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