Arpentons les rues de Lyon pour un voyage à travers les siècles ! Nous vous emmenons découvrir les étapes-clés de sa construction de l’Antiquité à nos jours. Une histoire riche qui a permis à la ville de se façonner avec ses quartiers, ses particularités, ses originalités. L’occasion aussi de mettre un coup de projecteur sur des monuments emblématiques de cette longue construction. Nombreux sont en effet les bâtiments qui ont su traverser les siècles et s’adapter en fonction des usages. Une belle démonstration encore de la pérennité de la pierre…
La ville de Lugdunum est fondée au cours de la Rome antique. C’est sous l’Empire romain qu’elle devient la capitale de la Gaule romaine, une cité puissante et cosmopolite. D’abord développée sur la rive droite de la Saône (partie de Lyon adossée à la colline de Fourvière), elle s’étend ensuite pour englober le bourg gaulois de Condate situé au pied de la Croix-Rousse, puis déborde sur l’Ile de Canabae, l’actuelle presqu’île de Lyon, et la colline de Fourvière.
Grâce à sa localisation, Lugdunum prospère rapidement. On y construit des aqueducs mais également de nombreux bâtiments comme le premier théâtre, le plus ancien de Gaule, inauguré entre -16 et -14 av. J.-C. Mais au-delà de ces différents monuments, tout un ensemble de noyaux urbains se développe autour de différentes communautés de commerçants comme les négociants en vin ou encore les potiers.
En 65, une très grande partie de la ville basse est détruite par un incendie. Après la reconstruction, on bâtit l’aqueduc du Gier, long de 85 km, qui permet de configurer différemment la ville plutôt au sommet de la colline de Fourvière. Lugdunum compte alors entre 50 000 et 80 000 habitants. La Saône la sépare en deux avec les patriciens du côté de Fourvière et du Vieux-Lyon et le peuple du côté de Condate et de Canabae. Du côté de la ville haute, sous l’actuelle esplanade de la basilique de Fourvière, le forum était entouré du temple capitolin, de la curie, de la basilique et du palais impérial. On construit aussi un théâtre auquel on adjoint un odéon ainsi qu’un cirque. Le quartier de Condate concentrait aussi plusieurs équipements gallo-romains dont l’amphithéâtre des Trois Gaules ou encore les thermes implantés sur l’actuelle place Sathonay.
Si à Lyon, la pierre a su particulièrement traverser les siècles pour s’adapter aux usages, le théâtre de Fourvière en est sans doute la plus belle expression. Ce théâtre antique est l’un des principaux monuments antiques visibles à Lyon. Aujourd’hui, il accueille chaque été les artistes du Festival des Nuits de Fourvière avec le succès qu’on lui connaît.
Aux 1er et 2ème siècles, il était déjà un lieu de spectacle réputé puisqu’il pouvait accueillir jusqu’à 10 000 spectateurs. Abandonné à la fin de l’Empire romain et même enseveli au Moyen-Âge, il aura fallu attendre 1933 pour assister à sa restauration. Son architecture est celle d’un théâtre romain classique avec ses trois séries de gradins en arc de cercle, un orchestre dallé de marbres polychromes et un haut mur de scène fermant l’édifice.
Si le gros-œuvre, les voûtes ou encore les gradins, est bâti en blocs de gneiss et de granite d’extractions proches de Lyon, les revêtements des gradins ont quant à eux été réalisés en calcaire dur, la pierre de choin extraite des carrières du Bugey. Depuis 1998, le site est inscrit au Patrimoine mondial de l’UNESCO. Lieu de concert, le théâtre fait aussi évidemment partie du parc archéologique de Fourvière avec l’Odéon et le Musée gallo-romain, haut-lieu du tourisme lyonnais.
Théâtre gallo-romain de Fourvière
A la fin de l’Empire romain, Lyon ne devient qu’une petite bourgade resserrée en bord de Saône, autour des églises et des cimetières. Si l’on sait peu de choses de l’urbanisation du Haut Moyen-Âge, on a connaissance de l’édification de plusieurs bâtiments religieux : les églises de Saint-Jean et de Sainte-Croix (2ème arrondissement), le baptistère Saint-Etienne, les basiliques Saint-Just et Saint-Irénée (5ème arrondissement). On sait également que le centre urbain est plutôt concentré sur la rive droite de la Saône. Ce sont alors les archevêques qui dirigent la Cité.
Aux 11ème et 12ème siècles, Lyon s’agrandit peu mais subit quelques modifications. De nombreuses constructions sont entamées. Le château de Pierre Scize, aujourd’hui disparu, permet de surveiller l’arrivée nord de la ville. Un pont de pierre est aussi entamé sur la Saône et permet le développement de la Presqu’île en reliant le quartier du Change (5ème arrondissement) à celui de Saint-Nizier (1er et 2ème arrondissements). Ce pont assez étroit supporte sur ses premières arches des maisons dotées d’étages et abritant des boutiques au rez-de-chaussée.
Pour accueillir l’importante population qui s’installe dans les quartiers de la Croix-Rousse et de Saint-Paul, on assiste à une grande extension du bâti. Mais c’est surtout au 13ème siècle que la population augmente franchement. Le pont sur le Rhône est un facteur essentiel de développement. Le plus grand chantier de la ville est celui de la cathédrale Saint-Jean entamé dès le 12ème siècle. Le quartier du Vieux-Lyon actuel, à l’époque ceinturé d’une muraille, se développe largement. A la fin du Moyen-Âge, l’urbanisation de la ville est encore très hétérogène.
Monument emblématique du Moyen-Âge lyonnais, l’Hôtel Dieu est aussi l’un des plus grands bâtiments de la Presqu’île. Dès le 12ème siècle, les lieux ont accueilli le premier hôpital lyonnais. Mais depuis 2010, le site n’accueille plus de services hospitaliers puisqu’il est finalement devenu un complexe moderne composé de commerces, d’un hôtel 5 étoiles, de bureaux, d’un centre de convention, de logements et de parking.
A travers ce site, les pierres ont traversé les siècles : les pierres de Saint-Cyr, Saint-Fortunat et Saint-Didier pour la partie 17ème siècle ; la pierre de Villebois et le calcaire de Lucenay pour la partie 18ème siècle ; la pierre de Seyssel pour la partie 19ème siècle. Au moment de la rénovation, très peu de pierres ont dû être changées. Quelques pierres de Seyssel ont été remplacées par de la pierre de Lens.
Vue de l'Hôtel-Dieu de Lyon, l’un des plus grands bâtiments de la Presqu’île
La Renaissance est une époque de prospérité et de développement à la fois urbain, économique et intellectuel. A la fin du 15ème siècle, les parties les plus peuplées sont la rive droite de la Saône et la Presqu’île. Mais les pentes de l’actuelle Croix-Rousse et la rive gauche du Rhône (des Brotteaux à la Guillotière) ont tendance à se densifier.
C’est au 16ème siècle que le pont de pierre sur le Rhône est achevé. Sur la Presqu’île, plusieurs cimetières de couvents ou d’églises sont transformés en places : les Jacobins, les Célestins. C’est aussi à cette époque qu’est aménagée la place des Terreaux. Le rempart de la Croix-Rousse est aussi érigé. De cette époque, on garde notamment dans le Vieux-Lyon de nombreux immeubles de style gothique mêlés à des éléments Renaissance. L’industrie de la soie fait son apparition et de nombreux ateliers sont montés dans toute la ville. Les ateliers d’imprimerie se multiplient également.
Durant les 17ème et 18ème siècles, la ville se densifie encore et s’embellit. Ce n’est qu’à la veille de la Révolution qu’elle s’étend au-delà de ses antiques murailles. Avec l’augmentation de la population, les habitations de nombreux quartiers sont surélevées. Quelques zones encore en friche sont bâties. On voit apparaître de plus en plus d’immeubles de 4 à 6 étages. On construit aussi de riches et larges maisons bourgeoises et nobiliaires, notamment autour des Terreaux et de Bellecour. C’est en 1624 que l’Hôpital de la Charité est édifié. Quant à l’Hôtel de Ville, il est construit entre 1646 et 1651. Au début du 18ème siècle, Soufflot trace les plans de l’Hôtel-Dieu et du premier opéra de la ville. A l’aube de la Révolution, on crée un quartier aux Brotteaux.
Le Palais Saint-Pierre est une ancienne abbaye bénédictine. C’est Anne de Chaulnes, fille du maréchal de France nommée abbesse en 1649 qui décide en 1659 de reconstruire cette abbaye que nomme alors Abbaye royale des Dames de Saint-Pierre. A l’époque, l’espace occupé par l’abbaye était plus vaste et débordait sur les rues adjacentes actuelles.
C’est à la Révolution française que les moniales sont expulsées. Mais le Palais n’a finalement été ni détruit ni modifié, et en 1801, la Bourse de commerce s’installe d’abord dans les lieux. Lorsque en 1860, la Bourse de commerce rejoint le Palais de la Bourse, un musée des Beaux-Arts est créé à l’intérieur du Palais Saint-Pierre. Au début, on décide d’en faire un lieu de conservation des tableaux, médailles et autres bronzes provenant des séquestres révolutionnaires.
En 1803, le Musée du Louvre envoie plus de 100 tableaux de peintres reconnus tels que Pierre Paul Rubens ou Philippe de Champaigne. Aujourd’hui, grâce aux acquisitions et legs successifs, le Musée des Beaux-Arts de Lyon est devenu l’un des premiers musées de France dans lequel les visiteurs peuvent parcourir 5000 ans d’histoire de l’art. Le site est inscrit aux Monuments historiques depuis 1927. La façade du Palais Saint-Pierre qui longe la place des Terreaux en pierre de taille colorée donne une allure particulièrement esthétique au bâtiment.
Cour intérieure du musée des Beaux-Arts de Lyon, situé place des Terreaux
Le soutien de Napoléon aux soyeux et la mise au point du métier Jacquard sont le point de départ d’un nouvel essor économique et industriel qui va durer jusqu’à la Première guerre mondiale. Durant cet âge d’or, Lyon est la ville des canuts mais aussi de la chimie, de l’automobile et de l’électricité.
Elle grossit aussi de façon considérable.De larges quartiers bourgeois sont créés. Lyon sort de ses murailles de l’Antiquité et s’étend en direction des Brotteaux, de la Guillotière et de Vaise. L’activité de la soie jusqu’alors installée dans les quartiers de Saint-Jean et Saint-Paul migre dans de nouveaux immeubles du quartier de la Croix-Rousse. C’est une période de rénovation urbaine avec sur la Presqu’île la percée de deux nouvelles larges avenues, la rénovation des ponts, la surélévation des quais.
C’est au 19ème siècle que le Parc de la Tête d’or est aménagé tout comme 3 gares dans les quartiers de Perrache, des Brotteaux et de la Guillotière. Lyon est reliée à Saint-Etienne par l’une des premières voies ferrées au monde, la première en France. Une ceinture de fortifications est entamée pour défendre la cité contre d’éventuelles attaques étrangères.
D’autres évolutions urbaines sont à noter à la fin du 19ème et au début du 20ème siècle : la construction du bâtiment de l’université de Lyon, de la préfecture de Lyon, de la Basilique de Fourvière. C’est à cette époque que l’architecte Tony Garnier démontre son influence avec les abattoirs de la Mouche, la Grande Halle (aujourd’hui Halle Tony Garnier), l’Hôpital de la Grange Blanche et bien sûr le Stade de Gerland en 1913.
Construites en 1831 et 1865, les prisons Saint-Joseph et Saint-Paul ont longtemps été connues pour leurs conditions d’incarcération. Lorsqu’elles ont fermé en 2009, des initiatives sont lancées pour éviter la démolition de ces monuments historiques. Aujourd’hui, l’ancienne prison Saint-Paul, transformée depuis quelques années en lieu de savoir, montre un tout nouveau visage. Elle accueille maintenant quelques 6000 étudiants de l’Université catholique. Quant à l’îlot de l’ancienne prison Saint-Joseph, il a été transformé en un programme de logements et de bureaux.
A chaque fois, on s’est attaché à conserver la mémoire des lieux, avec pour Saint-Joseph 40% des anciens bâtiments préservés. La structure en étoile de l’ancienne prison Saint-Paul composée d’une tour centrale et de six ailes abritant les anciennes cellules a été utilisée comme socle du nouveau campus. La prison Saint-Paul était entièrement construite en pierres de taille : pierres dorées du Lyonnais et pierres de Villebois. La prison de Saint-Joseph, bâtie sur un plan orthogonal en peigne, est construite en maçonneries enduites et pour partie en pierres de taille : pierres de Préty en Saône-et-Loire, pierres dorées des Monts d’Or, pierres de Villebois.
Pendant les Trente Glorieuses, la population lyonnaise a sensiblement augmenté atteignant 527 000 habitants en 1968. L’étalement urbain se produit essentiellement à l’Est. A partir des années 70, la population continue de croître mais avec une densité plus faible sur une surface toujours plus importante. Après-guerre, la période de la reconstruction permet d’atteindre de nouveaux horizons avec le développement de nouveaux moyens de communication : extension de l’autoroute A6 jusqu’à Lyon, construction de l’aéroport de Satolas, du tunnel de Fourvière, la première liaison TGV ou encore la gare multimodale de Lyon-Satolas. Le métro est inauguré en 1978.
Durant cette longue période qui nous emmène jusqu’à aujourd’hui, nous avons pu assister à la mise en place d’infrastructures diverses comme le Palais des congrès, l’Auditorium, la Bibliothèque de Lyon mais aussi à la création du quartier d’affaires de la Part-Dieu dans les années 60 ou celle du centre d’exposition Eurexpo dans les années 80. Au 20ème siècle, on prend conscience de la valeur patrimoniale des quartiers anciens avec l’inscription au Patrimoine mondial du Vieux-Lyon et de la Presqu’île.
Vue de la tour Incity depuis le quartier du Vieux-Lyon
Dans les années 2000, le secteur industriel lyonnais se développe autour de 4 types d’activités principaux : la chimie et la pharmacie, la métallurgie et la construction mécanique, l’électricité, et l’industrie textile. Les deux dernières décennies ont encore été celles du renouvellement urbain avec l’aménagement du quartier de la Confluence, le déménagement du marché-gare et des prisons de Saint-Paul et Saint-Joseph (2ème arrondissement).
Quant au quartier de la Part-Dieu, il a pu voir un important développement avec la construction de gratte-ciels comme la tour Oxygène puis la tour Incity. Le quartier de Gerland a aussi été touché par des restructurations autour de l’industrie pharmaceutique cette fois, avec la constitution de Lyonbiopôle et l’inauguration du laboratoire P4 Jean Mérieux en 1999. Enfin, le Musée des Confluences est construit sur la pointe de la Presqu’île comme un symbole de porte de la ville. Un projet qui s’est accompagné d’un réaménagement des quais et de la construction du pont Raymond Barre.
Classé aux Monuments historiques, cet établissement de style Art déco, emblématique de Lyon, a été un temps considéré comme la plus grande station-service du monde abritant aussi un immense garage pouvant accueillir jusqu’à 1000 voitures. Le bâtiment de 135 mètres de long et 52 mètres de large fut construit dans les années 30 par André Gustave Citroën.
Et c’est en 2016 que le lieu trouva une seconde jeunesse avec le projet New Deal : une reconversion en un programme mixte, bureaux et show-room, lui permettant de conserver son identité originelle. Sur 30 100 m2 répartis sur 6 étages, le New Deal accueille une concession automobile, une école de commerce et des plateaux de bureaux. Le hall d’honneur a été réaménagé, des patios ont été prévus aux étages pour laisser entrer la lumière. A l’origine, le garage Citroën a été construit en béton armé, seul matériau capable de réaliser une aussi grande structure d’un seul tenant.
Le Garage Citroën situé dans le 7ème arrondissement, © Étudiant.lefigaro.fr
Ces matériaux qui ont permis de construire la ville de Lyon depuis l’Antiquité
Grand Hôtel Dieu de Lyon, un chantier monumental pour magnifier la pierre